https://www.inserm.fr/dossier/troubles-stress-post-traumatique/
Publié le : 23/11/2020
Les troubles du stress post-traumatique (TSPT) sont des troubles psychiatriques qui surviennent après un événement traumatisant. Ils se traduisent par une souffrance morale et des complications physiques qui altèrent profondément la vie personnelle, sociale et professionnelle. Face à un même évènement, le risque de développer de tels troubles dépend de facteurs préexistants propres aux patients et du contexte dans lequel les suites de l’évènement se déroulent. La prise en charge passe essentiellement par la psychothérapie (thérapie cognitivo-comportementale, EMDR). Grâce aux recherches en cours, une meilleure compréhension des mécanismes qui favorisent la résurgence des souvenirs douloureux permettra, à terme, de prévenir, soulager voire guérir ces troubles.
Dossier réalisé en collaboration avec Pierre Gagnepain, chercheur de l’équipe Mémoire et oubli, au sein de l’unité Neuropsychologie et imagerie de la mémoire humaine (U1077 Inserm/Université de Caen Normandie/École pratique des hautes études), Caen.
Comprendre les troubles du stress post-traumatique
Les troubles du stress post-traumatique (TSPT) se développent après un événement extrêmement traumatisant et se manifestent par sa reviviscence régulière, accompagnée de manifestations physique liées à l’émotion extrême ressentie. Ils altèrent de façon significative la vie personnelle, sociale et/ou professionnelle.
Ces troubles psychiatriques surviennent chez des enfants ou des adultes qui ont été exposés à un événement marquant, comme une menace de mort imminente, de blessure grave ou d’atteinte de l’intégrité physique dont ils ont été victimes ou témoins. Les TSPT peuvent également survenir après l’annonce d’une mort violente ou inattendue, ou d’un évènement grave touchant un proche.
Aussi, les individus souffrant de TSPT peuvent être tout autant des personnes qui ont participé à des combats militaires, été victimes d’une agression physique ou sexuelle, d’une catastrophe naturelle, ou d’une prise d’otage, que des professionnels qui sont intervenus sur des terrains de catastrophes, des parents qui ont perdu un enfant ou encore des témoins d’un accident, d’un attentat ou d’une catastrophe naturelle. Toutes ont pour point commun d’avoir vécu cet évènement comme un facteur de stress intense ou d’effroi, face auxquels ils se sont sentis impuissants.
Une prévalence élevée dans certaines populations
La prévalence des TSPT serait de 5 à 12% dans la population générale, mais ces données sont principalement issues d’études menées aux Etats-Unis (les études sur le sujet sont plus rares en France et dans les autres pays). De plus, ces chiffres pourraient être sous-estimés du fait de la méconnaissance du trouble et de ses présentations incomplètes qui peuvent échapper au diagnostic.
Il existe davantage de données concernant certaines populations spécifiques, plus souvent touchées par les TSPT (et donc plus étudiées). On estime par exemple que près d’un quart des militaires qui ont participé à une guerre sont concernés par ces troubles.
Concernant les témoins directs ou indirects d’actes terroristes, plusieurs enquêtes épidémiologiques ont récemment été conduites en France, en collaboration avec des équipes de l’Inserm. Ainsi, 6 à 18 mois après les attentats de janvier 2015 (Charlie Hebdo, Hyper Casher, Montrouge, Dammartin-en-Goële), 18% des témoins présentaient des TSPT, avec une prévalence allant de 3% parmi les témoins à proximité et jusqu’à 31% chez les personnes directement menacées (Etude IMPACTS). Les troubles concernaient également 3% des intervenants (policiers, soignants...), sachant qu’une proportion significative de l’ensemble des témoins sans TSPT présentait des troubles anxieux ou dépressifs liés à l’évènement. Une enquête similaire a été menée après les attentats de novembre 2015 (Paris, Saint-Denis) : elle a montré une prévalence des TSPT de 54% chez les personnes directement menacées et presque autant chez les personnes qui ont perdu un proche lors de ces évènements (étude ESPA-13 Novembre).
Une autre étude conduite à la suite de cette série d’attentats a décrit que la population générale pouvait avoir développé un TSPT sans avoir été directement témoin ou concernée personnellement par des évènements collectifs traumatisants : le temps passé à visualiser les images de ces attaques à la télévision était associé à un risque accru de développer des symptômes de stress post-traumatique spécifiques, toutes choses étant égales par ailleurs.
Un diagnostic associant reviviscence, évitement et activité neurovégétative
Le diagnostic de TSPT est posé chez une personne qui a affronté un évènement traumatique lorsqu’elle présente plusieurs manifestations responsables d’une souffrance et d’une altération du fonctionnement social et de la qualité de vie de façon significative :
Une reviviscence répétitive des évènements qui peut se manifester sous différentes formes : des flash backs soudains faisant revivre la scène ou faisant penser qu’on se trouve en présence de son agresseur, l’intrusion involontaire et envahissante d’images ou de pensées relatives à l’évènement, des cauchemars de répétition ou la peur réflexe face à des bruits ou mouvements brusques… Cette reviviscence survient spontanément, suite à un stimulus (son, lieu, odeur…) ou encore lorsque la vigilance est moindre (phase d’endormissement). Elle entraîne des manifestations physiques relatives à la détresse psychique : sueur, pâleur, tachycardie, raidissement....
Un évitement des pensées, discussions ou personnes en rapport avec le traumatisme qui vise d’abord à ne pas faire face à la douleur liée au trauma. De la peur des idées intrusives qui guide cet évitement vont découler des tentatives pour les supprimer de la mémoire. Ces tentatives, généralement inefficaces, vont renforcer la peur initiale.
Des troubles de l’humeur et un émoussement de la réactivité, des affects, et de l’intérêt pour les activités habituelles, sont souvent présents.
Le développement de signes d’une activité neurovégétative : hypervigilance, irritabilité, difficultés de concentration, troubles du sommeil… sont également observés.
Dans le décours immédiat de l’évènement, ces signes sont considérés comme un état de stress aigu. On parle de TSPT aigus lorsqu’ils persistent plus de 4 semaines. La plupart des personnes vont guérir de ces troubles dans les 3 mois suivant l’évènement, mais environ 20% vont développer une forme chronique du syndrome.
Il faut aussi noter que, s’ils apparaissent généralement immédiatement, au bout de quelques jours, les TSPT s’installent parfois plus progressivement, se constituant tardivement, après plusieurs semaines, mois ou années.
Un impact puissant sur la vie quotidienne et l’état de santé
Lorsqu’il n’est pas pris en charge, le stress post-traumatique se chronicise et s’associe à d’autres types de manifestations : l’individu se plaint de fatigue chronique et ne présente ni énergie, ni motivation pour mener les activités habituelles de sa vie quotidienne. Il développe souvent des troubles du comportement alimentaire (anorexie, boulimie…), une perturbation de sa vie affective et de sa libido.
Les TSPT sont souvent associés à d’autres troubles de santé mentale comme la dépression ou l’anxiété. Il a des répercussions handicapantes sur la vie sociale, familiale et professionnelle. La souffrance est telle qu’elle accroît le risque de dépendance à des substances psychoactives ou le risque suicidaire.
Par ailleurs, le TSPT est associé à un état de stress chronique qui va retentir sur la santé somatique de l’individu : les personnes qui en souffrent ont un surrisque de migraine, d’hypertension artérielle, d’ulcère gastrique, de maladies dermatologiques…